JEAN FLUHR
AUJOURD'HUI ET DEMAIN
Aujourd'hui, après bien des péripéties liées à ma carrière d'officier, je ressens le besoin viscéral de replonger mes racines dans la terre de mes ancêtres maternels pour y retrouver, même modifiés par le temps, mon bonheur de gosse, ma RIGOLE, l'ATELIER, la famille SOULIÉ, qui me compte parmi les siens avec une infinie tendresse, presque silencieuse. Mais quelle résonance intime dans le coeur de chacun de nous!
Ici, je vis un autre temps, une autre dimension de ma vie dont le terme conduira ma dépouille sur cette terre pour la dernière fois, afin d'y reposer à tout jamais au milieu des miens et de ceux que j'ai profondément aimés.
Une étude psychanalitique serait-elle en mesure d'analyser un tel amour , par essence de nature irrationnelle? Je l'ignore. Laissons donc libre cours à nos élans intérieurs qui, le long d'un parcours erratique nous conduisent vers un questionnement sans réponse.
Suis-je las des plaisirs prédigérés que m'offre un matérialisme constamment renouvelé au gré des modes?
Suis-je en train de demander inconsciemment au temps de ralentir sa course inexorable afin de profiter silencieusement des choses simples et saines de la nature et , plus précisément, de celle de PUICHÉRIC, dont chaque pierre m'interpelle, chaque senteur me rappelle, les yeux fermés, le lieu d'un moment de bonheur?
Suis-je tout simplement en train de vieillir dans un monde agressif qui tire trop vite son tapis sous mes pieds?
C'est certainement un subtil mélange de tous ces facteurs, auxquels se mêlent allègrement la brève tentative d'analyse cartésienne du phénomène et une réflexion plus profonde sur la dernière partie de mon existence qui se conjugue avec une once de rêverie plaisante que je n'ai nullement envie de freiner.
Etre heureux et comblé dans les différents compartiments de la vie ne m'empêche pas de vivre en symbiose avec le village au coeur duquel, les parfums, les couleurs et les gens réveillent dans ma mémoire une vie antérieure assoupie.
Dans ce contexte, je ne pense pas réagir différemment d'autrui, en particulier, ceux qui ont eu dans leur enfance des attaches très fortes avec la terre et les pierres d'un coin de France.
Pour ma part, j'ai trouvé dans ce pays, en plus du reste, des gens qui cultivaient tous les jours la générosité sans calcul ni intérêt. Et mes grands-mères rajoutaient à cela une grande affection reposant sur la confiance mutuelle et le sens de la liberté de chacun.
Aujourd'hui, les images précises des amis du quartier se télescopent dans mon subconscient, caressées par les senteurs de la vigne naissante, du fenouil, des oliviers balayés par le vent d'Autan, la fraîcheur des chais et les odeurs fortes des écuries.
L'atelier des SOULIÉ, le brave "BIJOU" cheval aimable de BONNET et SOLANILLE, la grande ROSE, Jean-Pierre, Gérard et les autres, tous reviennent constamment aux frontières du souvenir.
Nous nous aimions, voilà tout. Et demain, pendant encore très longtemps, je souhaite gambader avec Jean-Pierre et mes ombres aimées sur les chemins du bonheur simple et profond: ceux de PUICHÉRIC.
À l'avenir, mon petit journal prendra la forme de courtes nouvelles qui traduiront les faits et émotions lors de mes visites trimestrielles à PUICHÉRIC.
Avec Marie-Christine et Maryse ( photographe), Françoise et Jean ont marché dans l'ALARIC pendant près de trois heures